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La plus précieuse des marchandises – Michel Hazanavicius

Un conte tragique et lumineux

Adapté du livre de Jean-Claude Grumberg, le premier film d’animation de Michel Hazanavicius surprend par son style artistique épuré et son sujet grave. Porté par la voix poignante de Jean-Louis Trintignant, ce récit bouleverse autant qu’il instruit.

« Il paraît que cette histoire est un conte et que rien de tout ça est arrivé. Ni les trains, ni les camps, ni les familles dispersées en fumée, ni le feu, ni les cendres, ni les larmes, ni la guerre, ni les survivants, ni la douleur des pères et des mères recherchant leurs enfants disparus. »

C’est avec ce message à peine voilé à l’attention des négationnistes que se termine, avec la voix touchante de Jean-Louis Trintignant dont ce sera également les dernières paroles (il s’éteindra 2 mois plus tard), « La Plus précieuse des Marchandises » de Michel Hazanavicius. Après « The Artist », « Le Redoutable » ou le délirant « Coupez ! » Hazanavicius, comme à son habitude, arrive là où on ne l’attendait pas avec son premier film d’animation dont il a lui-même dessiné les personnages, disponible sur la plateforme Canal+ et, chose peu connue, coproduite par les frères Jean-Pierre et Luc Dardenne.

Une diffusion utile et rapide

Il est heureux le temps où il ne faut plus attendre plus d’un an après leur sortie en salle pour que les films soient disponibles sur les plateformes. Depuis le début de l’année, les durées sont variables selon les supports : 4 mois pour une sortie en DVD, 9 sur Disney+, 15 sur Netflix, 17 sur Max, Prime Video et Apple TV+ et seulement 6 mois pour le plus grand partenaire du cinéma en France, Canal+. C’est ainsi que « La Plus précieuse des Marchandises », sorti fin novembre 2024 est visible sur la plateforme de Canal ce qui tombe assez bien, une petite piqûre de rappel n’est en effet pas inutile par les temps qui courent, fût-elle un peu douloureuse, vous savez, comme quand l’infirmière rate la veine, que ça picote et que vous avez un gros hématome.

Un conte dur sous une forme poétique

Parce que, même si « La Plus précieuse des Marchandises » porte un titre trognon et qu’il est adapté d’un conte écrit par Jean-Claude Grumberg publié en 2019 aux éditions du Seuil, il n’y a rien de réellement très charmant. Un bûcheron et une bûcheronne vivent isolés dans la pauvreté à côté d’une voie de chemin de fer qui traverse une forêt enneigée où passent trop souvent de terribles trains. Immédiatement, plus aucun doute sur le décor, l’époque et le contexte. Ces pauvres et simples forestiers viennent d’enterrer leur seul enfant lorsque, d’un wagon, est jeté un bébé qu’amortit la neige à deux pas de la bûcheronne. Tombé d’un train pendant une guerre où il est naturel de liquider la vermine des « sans cœur » – le mot en J ne sera jamais prononcé de tout le film, pas plus que d’autres évidences historiques suggérées par des images parfois purement artistiques, comment cette petite fille pourra s’en sortir dans un monde aussi froid, aussi lugubre aussi sépulcral ? Trois adjectifs qui résument à eux seuls toute l’ambiance d’un film tragiquement réel, sans doute nécessaire.

Un héritage du cinéma d’animation engagé

Depuis le « Tombeau des Lucioles » du studio Ghibli, rarement on avait ressenti un sentiment aussi désillusionné dans un film d’animation. Il est vrai que le sujet de la Shoah est difficilement traitable sous le couvert de la comédie, « La Vie Est Belle », le chef-d’œuvre de Roberto Benigni étant l’exception qui confirme la règle. Pourtant, dans le petit livre de 52 pages dont il est adapté, c’est avec plus de recul que l’auteur, Jean-Claude Grumberg (co-auteur du film) a pris soin d’en donner une lecture plus accessible avec un champ lexical volontairement sans détails sur le contexte pour encourager une double lecture de parents à enfants sans doute plus complexe à faire passer à l’écran.

La plus précieuse des marchandises de Michel Hazanavicius
La plus précieuse des marchandises de Michel Hazanavicius

Un style visuel inspiré et expressif

Le choix des graphismes n’est pas innocent dans le sentiment de désespoir qui émane dans ce long périple à travers les terreurs de la Shoah. Inspiré de la xylographie, ou gravure sur bois, technique très ancienne utilisée en Chine, puis en Corée et au Japon au VIIe siècle et plus tard par des peintres comme Félix Vallotton, elle consiste à graver une image sur une planche de bois, puis à encrer la surface et à l’imprimer sur papier pour obtenir des illustrations à forts contrastes entre nuances de noir et de blanc, sans dégradés, en simplifiant les formes. Un style minimaliste évident dans « La Plus précieuse des Marchandises » qui en fait également une œuvre artistique marquante de l’histoire de l’estampe moderne.

La plus précieuse des marchandises de Michel Hazanavicius, estampe de Félix Valloton

Estampe de Félix Valloton.

Des voix fortes pour incarner les ombres

Un film d’animation, c’est aussi des voix. Celles des comédiens qui vont donner une identité aux personnages. Difficile aujourd’hui de passer outre les bancables, peut-être malheureusement pour tous les comédiens de voix off talentueux, mais méconnus. Sur une affiche de film d’animation, il faut aussi des noms célèbres. Alors, sur celle de « La Plus précieuse des Marchandises », on aurait pu voir celui de Gérard Depardieu, prévu pour le bûcheron, mais finalement retiré d’un commun accord suite aux mises en cause de l’acteur pour les tristes affaires que l’on connaît. N’en reste pas moins que l’on entendra trois sociétaires de la Comédie Française, Dominique Blanc, la pauvre bûcheronne, Denis Podalydès, l’homme à la gueule cassée et Grégory Gadebois en lieu et place de Gérard Depardieu. Serge Hazanavicius, le frère du réalisateur, présent quelque part dans presque tous ses films est le méchant collabo et bien entendu, Jean-Louis Trintignant, dont ce sera le dernier film, en narrateur.

Une musique discrète mais puissante

Et s’il est un élément fondamental (dont on ne parle que trop peu) d’un film, quel qu’il soit ; d’animation, de fiction ou de documentaire, c’est bien entendu, la musique. Il faut rendre ici hommage à Alexandre Desplat, compositeur français majeur du cinéma mondial contemporain à qui l’on doit notamment les B.O. de « L’Étrange Histoire de Benjamin Button », « Le Discours d’un roi », « Moonrise Kingdom », « Adults in the Room », « La Forme de l’eau » et des dizaines de blockbusters dont la liste serait trop longue pour ce seul article. La gageure de la partition de « La Plus précieuse des Marchandises » était de souligner avec humilité et sans exagération larmoyante un pan d’histoire que bien des envolées lyriques auraient pu facilement nous tirer les larmes. La musique d’Alexandre Desplat réussit, doucement et sans effluves à accompagner le propos sans jamais se substituer à lui. À écouter comme une œuvre à part lorsque vous regarderez à nouveau ce film avec un regard peut être différent.

Les ateliers et les rencontres avec des professionnels du cinéma constituent une autre facette essentielle des événements cinématographiques à Lyon. Le Festival Lumière, en particulier, propose des Masterclass animées par des réalisateurs, des acteurs et des critiques de cinéma renommés.

Découvrez les coulisses de la création cinématographique et échangez avec des figures emblématiques du 7e art. Tout se déroule dans le Village du Festival Lumière, installé dans le parc de l’Institut Lumière.

Le village est un lieu de rencontre où le public et les invités peuvent se retrouver autour de stands de DVD, de librairies spécialisées dans le cinéma. Ces interactions enrichissent l’expérience cinématographique et favorisent la transmission des connaissances et des passions entre les générations de cinéphiles.

Les Fonds de dotation à Lyon permettent de mettre en relation des jeunes talents, des producteurs locaux et des mécènes du cinéma. Le but ? Soutenir le mécénat culturel et les projets audiovisuels indépendants.

Outre le Festival Lumière, Lyon accueille tout au long de l’année divers événements cinématographiques. Les « Nuits du cinéma » proposent des marathons de films cultes, tandis que des projections de films muets accompagnés de musique live offrent une expérience unique.

Des séances familiales et des événements accessibles à tous les publics, des enfants aux personnes âgées, renforcent la passion pour le 7e art et maintiennent une culture cinématographique vivante dans la ville.