Révélation du drame La Mer au loin, réalisé par Samir Aït Benali et tourné entre Marseille et Tanger, Ayoub Gretaa s’impose comme l’un des visages à suivre des César 2026.
Dans le rôle de Nour, un homme en exil qui cherche à se reconstruire, il offre un jeu juste et sensible. Rencontre avec un acteur qui confirme déjà un formidable potentiel.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de jouer dans La Mer au loin lorsque vous avez découvert le scénario pour la première fois ?
Ce qui m’a attiré dès les premières pages, c’est l’humanité du récit. J’ai senti que ce n’était pas juste une histoire d’exil, mais une histoire d’homme. Un gars qui tombe, qui se relève, qui doute, qui espère. J’ai reconnu des émotions et des réalités que j’ai déjà croisées dans ma vie. J’ai eu envie d’être cette voix-là.
Votre personnage traverse un parcours d’exil et de reconstruction. Quels aspects de cette histoire vous ont le plus touché personnellement ?
Ce qui m’a le plus touché, c’est la solitude silencieuse. Cette sensation d’être parmi les gens mais de n’appartenir à aucun endroit. Beaucoup de personnes la vivent, même sans quitter leur pays. Et puis la reconstruction… ce moment où tu dois réapprendre à marcher tout seul, même quand t’as peur. Ça m’a parlé, parce que moi aussi, dans ma vie, j’ai dû me reconstruire plusieurs fois.
Le film suit l’évolution de votre personnage sur plusieurs années. Comment avez-vous travaillé cette transformation au fil du temps ?
Ayoub Gretaa – photo Aurelie Lamachere
J’ai travaillé sur deux axes : le corps et le regard.
Quand Nour est jeune, il déborde d’énergie. Il bouge, il danse, il respire la vie. Ses regards sont ouverts, curieux, presque naïfs. J’ai voulu montrer un garçon qui s’offre au monde sans filtres.
Avec le temps, tout change. Nour devient plus dans l’écoute, plus dans la réflexion. L’énergie reste, mais elle se déplace à l’intérieur. Au début, je jouais tout en extérieur : les gestes, les réactions, la spontanéité. Puis j’ai commencé à tout intérioriser : les silences, les tensions, les hésitations.
Et le maquillage m’a beaucoup aidé. Chaque couche ajoutait une année, un poids, une trace. À moi ensuite d’ajuster le corps et les yeux pour que la transformation soit crédible.
Le récit mélange dureté et moments de douceur. Comment avez-vous trouvé l’équilibre pour rester juste, sans tomber dans le cliché ?
En restant humble. La vie, elle n’est jamais 100% tragique ni 100% belle. Même dans la douleur il y a un rire, même dans la joie il y a une ombre. J’ai juste suivi cette vérité-là. Je n’ai pas cherché à “jouer le drame” ou “jouer la douceur” — j’ai joué l’humain, et l’humain est toujours entre deux mondes.
Avec votre pré-nomination aux César, qu’est-ce que cela représente pour vous et pour la visibilité de ce type d’histoires au cinéma ?
Déjà, c’est un honneur. Je n’ai jamais couru derrière les récompenses, mais quand ça arrive, c’est une reconnaissance du travail et de l’équipe. Et surtout, ça donne de la lumière à des récits qui n’en ont pas assez. Les parcours d’exil, de survie, d’espoir… ce sont des histoires vraies, et le cinéma doit les porter haut.
Si vous deviez résumer La Mer au loin en une seule sensation ou un seul mot, lequel choisiriez-vous et pourquoi ?
Respirer. Parce que le film parle de ça au fond : chercher l’air, chercher une pièce, chercher un horizon où tu peux enfin souffler.